Retour à la page d'accueil

   Retour à la page "Temps liturgique"

La pénitence

extrait du Catéchisme du Concile de Trente

 

Chapitre 22 — Du sacrement de Pénitence

Voici comment la définissent les Pères du Concile de Trente: " La Contrition est une douleur de l’âme et une détestation du péché commis, avec un ferme propos de ne plus pécher à l’avenir. " Puis parlant un peu plus loin du mouvement de la Contrition, ils ajoutent: Ce mouvement prépare à la rémission des péchés, pourvu qu’il soit accompagné de la confiance en la miséricorde de Dieu et de la volonté de faire tout ce qui est nécessaire pour bien recevoir le sacrement de Pénitence.

Cette définition fera très bien comprendre aux Fidèles que l’essence de la Contrition ne consiste pas seulement à cesser de pécher, à prendre la résolution de mener une vie nouvelle, ou même commencer déjà ce nouveau genre de vie, mais encore et surtout à détester et à expier le mal de la vie passée. C’est ce que prouvent parfaitement ces gémissements des Saints que nous retrouvons si souvent dans nos saintes Lettres. " Je m’épuise à gémir, dit David , je baigne toutes les nuits mon lit de mes larmes. Et encore Le Seigneur a écouté la voix de mes pleurs. "

Isaïe s’écrie à son tour: " Je repasserai en votre présence, Seigneur, toutes mes années dans l’amertume de mon âme. " Paroles qui, comme tant d’autres semblables, sont l’expression évidente d’un repentir profond des fautes commises et de la détestation de la vie antérieure.

Mais quand on dit que la Contrition est une douleur, il faut avertir les Fidèles de ne point s’imaginer qu’il est ici question d’une douleur extérieure et sensible. La Contrition est un acte de la volonté. Et Saint Augustin nous avertit que " la douleur accompagne le repentir, mais qu’elle n’est pas le repentir.  " Les Pères du Concile se sont servis du mot douleur pour exprimer la haine et la détestation du péché, soit parce que la sainte Écriture s’en sert elle-même: " Jusques à quand, s’écrie David, mon âme sera-t-elle agitée de pensées diverses, et mort cœur en proie à la douleur durant le jour entier ? " soit aussi parce que la Contrition engendre la douleur dans cette partie inférieure de l’âme qui est le siège de la concupiscence. Ce n’est donc pas à tort qu’on a défini la Contrition une douleur, puisqu’elle produit précisément de la douleur, et que les pénitents, pour exprimer plus sensiblement celle qu’ils ressentent, ont coutume de changer même leurs vêtements ; ainsi qu’on le voit par ces paroles de notre Seigneur dans Saint Matthieu: " Malheur à toi Corozaïn ! Malheur à toi Bethsaide ! parce que si les miracles qui ont été faits au milieu de vous, avaient été accomplis Tyr et à Sidon, ces villes auraient fait pénitence sous le cilice et la cendre. "

C’est encore avec raison que la détestation du péché dont nous parlons a reçu le nom de Contrition. On voulait exprimer par là la violence de la douleur qu’elle cause. Il y a dans ce mot une figure empruntée aux choses matérielles qui se brisent en morceaux, quand on les frappe avec une pierre ou un autre corps plus dur. De même le mot de Contrition signifie que nos cœur s endurcis par l’orgueil sont brisés et broyés par la force du repentir. Et c’est pourquoi aucune autre douleur, — qu’elle soit causée par la mort de parents et d’enfants chéris, ou par toute autre calamité — ne prend jamais ce nom ; il est absolument réservé à cette douleur que nous fait éprouver la perte de la grâce de Dieu et de l’innocence.

Il est encore d’autres termes que l’on emploie assez fréquemment pour désigner cette détestation du péché. tantôt elle s’appelle brisement du cœur, parce que l’Écriture Sainte prend souvent le cœur pour la volonté. De même que le cœur est le principe des mouvements du corps, de même aussi la volonté règle et gouverne toutes les autres puissances de l’âme. tantôt les Pères lui donnent le nom de componction du cœur, en sorte qu’ils ont donné ce titre aux ouvrages qu’ils ont écrits sur la Contrition. De même en effet qu’on ouvre avec le fer un ulcère qui est enflé, afin que le pus qu’il renferme puisse en sortir, ainsi le scalpel de la Contrition, — si l’on peut parler de la sorte — ouvre les cœurs, pour en faire sortir le poison mortel du péché. Aussi le Prophète Joël appelle-t-il la Contrition " un déchirement du cœur " " Convertissez-vous n moi de tout votre cœur, dans le jeune, dans les pleurs et dans les gémissements, et déchirez vos cœurs. "

La douleur d’avoir offensé Dieu par le péché doit être souveraine, et telle que l’on ne puisse en concevoir de plus grande. Il est facile de démontrer cette vérité par les considérations suivantes

Puisque la vraie Contrition est un acte de Charité qui procède de la crainte filiale, il est évident que la Contrition ne doit point avoir d’autre mesure que la Charité elle-même. Et comme la Charité par laquelle nous aimons Dieu est l’amour le plus grand, il s’en suit que la Contrition doit emporter avec elle la douleur de l’âme la plus vive. Dès lors que nous devons aimer Dieu plus que toutes choses, plus que toutes choses aussi nous devons détester ce qui nous éloigne de Lui. Et ce qui confirme notre raisonnement, c’est que les saintes Ecritures emploient les mêmes termes pour exprimer l’étendue de la Charité et celle de la Contrition. Ainsi, en parlant de la première elles disent : " Vous aimerez le Seigneur votre Dieu de tout votre cœur ; " et, quand il s’agit de la Contrition le Seigneur nous crie par la bouche du Prophète  : " Convertissez-vous de tout votre cœur. "

En second lieu, de même que Dieu est le premier de tous les biens que nous devons aimer, de même aussi le péché est le premier et le plus grand de tous les maux que les hommes doivent haïr. Et par conséquent la même raison qui nous oblige à reconnaître que Dieu doit être souverainement aimé, nous oblige également à concevoir pour le péché une haine souveraine. L’amour de Dieu doit être préféré à tout. Même pour conserver sa vie il n’est pas permis de pécher. Il y a là pour nous un devoir formel. Ecoutons plutôt ces paroles de Notre-Seigneur : " Celui qui aime son père ou sa mère plus que Moi n’est pas digne de Moi. " Et encore : " Celui qui voudra sauver sa vie la perdra. "

Remarquons encore que la charité, au témoignage de Saint Bernard, ne peut avoir ni limite, ni mesure. Car, dit-il: " La mesure d’aimer Dieu, est de L’aimer sans mesure. " Par conséquent il doit en être de même de la détestation du péché. Elle ne peut être limitée.

Ce n’est pas assez que cette détestation du péché soit souveraine, il faut encore qu’elle soit si vive et si profonde, qu’elle exclue toute négligence et toute paresse. Il est écrit dans le Deutéronome : " Lorsque vous chercherez le Seigneur votre Dieu, vous Le trouverez, pourvu cependant que vous Le cherchiez de tout votre cœur, et dans toute la douleur de votre âme. " Et dans Jérémie  : " Vous Me chercherez, et vous Me trouverez lorsque vous M’aurez cherché de tout votre cœur ; car alors Je me laisserai trouver par vous, dit le Seigneur. "

Mais, quand même notre Contrition ne serait pas aussi parfaite que nous venons de le dire, notre repentir pourrait cependant être véritable et efficace. Il arrive souvent que les choses sensibles font sur nous des impressions plus vives que les choses spirituelles. Et l’on voit des personnes à qui la mort de leurs enfants, par exemple, cause une douleur plus vive que la laideur du péché. II n’est pas non plus nécessaire, pour que la Contrition soit réelle, qu’elle fasse verser des larmes. toutefois ces larmes sont bien désirables dans la Pénitence, et il faut y exciter fortement. " Vous n’avez point les entrailles de la piété chrétienne, dit très bien Saint Augustin , vous qui pleurez un corps que l’âme a quitté, et qui ne pleurez point une âme dont Dieu s’est éloigné. " C’est aussi ce que signifient ces paroles de notre-Sauveur que nous avons rapportées plus haut : " Malheur à toi, Corozaïn ! Malheur à toi, Bethsaïde ! parce que si les miracles qui ont été faits au milieu de vous s’étaient accomplis dans Tyr et dans Sidon, ces villes auraient fait pénitence sous le cilice et la cendre. " Mais il nous suffit, pour établir cette vérité, de rappeler les exemples fameux des ninivites , de David , de la femme pécheresse et du prince des Apôtres , qui tous implorèrent avec des larmes abondantes la miséricorde de Dieu, et obtinrent par là le pardon de leurs péchés.

Il sera bon d’apprendre aux Fidèles et de les exhorter de la manière la plus pressante à former un acte particulier de Contrition pour chaque péché mortel. nous le concluons de ces paroles d’Ezéchias :, " Je repasserai en votre Présence toutes les années de ma vie dans l’amertume de mon âme. " Repasser toutes ses années dans son esprit, c’est rechercher ses péchés les uns après les autres, pour les déplorer du fond du cœur, chacun en particulier. nous lisons encore dans Ezéchiel : " Si l’impie fait pénitence de tous ses péchés, il vivra. " C’est dans le même sens que Saint Augustin dit: " Que le pécheur examine la qualité de son péché d’après le lieu, le temps, la chose et la personne. "

Mais que les Fidèles ne désespèrent jamais de la bonté et de la clémence infinie de notre Dieu, souverainement désireux de notre salut. Ce Dieu n’apporte jamais de retard à nous accorder notre pardon ; Il étend sa tendresse paternelle sur le pécheur aussitôt qu’il rentre en lui-même et qu’il déteste tous ses péchés en général, pourvu seulement qu’il ait l’intention de les rappeler plus tard, s’il le peut, à son souvenir, et de les détester chacun en particulier.

C’est ce que le Seigneur Lui-même nous ordonne d’espérer, quand Il dit par son Prophète : " Du jour où l’impie se sera converti, son impiété ne lui nuira plus. "

Après ce que nous venons de dire, il est facile de voir quelles sont les conditions nécessaires à une véritable Contrition. Ces conditions doivent être expliquées aux Fidèles avec le plus grand soin, afin que tous sachent par quels moyens ils pourront l’acquérir, et qu’ils aient une règle sûre pour discerner jusqu’à quel point ils peuvent être éloignés de la perfection de cette vertu.

La première chose nécessaire, c’est de haïr et de détester tous les péchés que nous avons eu le malheur de commettre. Si nous n’éprouvions de repentir que pour quelques-uns seulement, notre Pénitence ne serait point salutaire. Elle serait fausse et simulée. Car, comme il est écrit dans l’Apôtre Saint Jacques: " Celui qui observe toute la Loi excepté en un seul point qu’il transgresse est coupable de la Loi tout entière. "

La seconde, c’est que notre Contrition renferme la volonté de nous confesser et de satisfaire: deux points dont nous parlerons tout à l’heure.

La troisième, c’est que le pénitent prenne la résolution ferme et sincère de réformer sa conduite. Le Prophète nous l’enseigne clairement par ces paroles: " Si l’impie fait pénitence de tous les péchés qu’il a commis, s’il observe tous mes Commandements, et qu’il pratique la justice et le jugement, il vivra de la vie, et il ne mourra point ; et Je ne me souviendrai point de toutes les iniquités qu’il a commises. " Et un peu plus loin il dit encore : " Lorsque l’impie aura quitté l’impiété qu’il a commise, et qu’il pratiquera la justice et le jugement, il donnera la vie à son âme. " Et enfin il ajoute: " Convertissez-vous et faites pénitence de tous vos péchés, et votre iniquité ne tournera pas à votre raine. Jetez loin de vous toutes vos prévarications, par lesquelles vous avez péché, et faites vous un cœur nouveau et un esprit nouveau. " C’est là aussi ce que Notre-Seigneur ordonne Lui-même à la femme oui avait été surprise en adultère: " Allez, lui dit-il, et ne péchez plus, " et au paralytique qu’Il avait guéri près de la piscine: " Voilà que vous êtes guéri, prenez garde de ne plus pécher. "

D’ailleurs la nature et la raison elle-même nous montrent clairement qu’il y a deux choses absolument nécessaires pour rendre la Contrition sincère et véritable, à savoir le repentir des péchés commis, et la résolution de n’en plus commettre à l’avenir. Quiconque veut se réconcilier avec un ami qu’il a offensé doit tout ensemble déplorer l’injure et l’outrage dont il s’est rendu coupable à son égard, et ne rien négliger dans la suite pour éviter de blesser en quoi que ce soit la religion de l’amitié.

Mais ces deux choses doivent encore être nécessairement accompagnées de l’obéissance, car il est juste que l’homme obéisse à la loi naturelle, divine ou humaine à laquelle il est soumis. Si donc un pénitent a dérobé quelque chose à son prochain par violence ou par fraude, il est obligé de restituer. De même il doit faire satisfaction par quelque service et quelque bienfait à celui qu’il a lésé, en parole ou en action, dans ses emplois ou dans sa vie. tout le monde connaît cette parole de Saint Augustin qui est devenue un véritable axiome: " Le péché n’est point remis, si ce que l’on a pris n’est point rendu. "

Mais parmi les conditions que la Contrition exige, il ne faudrait pas considérer comme peu important et peu essentiel de remettre et de pardonner entièrement toutes les injures qu’on a reçues. Notre-Seigneur et Sauveur nous en avertit et nous dénonce Lui-même cette obligation: " Si vous remettez aux hommes leurs offenses envers vous, votre Père céleste vous remettra les vôtres ; mais si vous ne pardonnez pas aux hommes, mon Père non plus ne vous pardonnera point. "

Voilà ce que les Fidèles ont à observer dans la Contrition. toutes les autres dispositions que les Pasteurs pourront facilement déduire de celle-ci peuvent bien rendre la Contrition plus parfaite et plus entière en son genre ; mais elles ne doivent pas être regardées comme absolument nécessaires, et l’on peut, sans elles, avoir un repentir véritable et suffisant.

Mais comme ce n’est pas assez pour les Pasteurs d’enseigner sua Fidèles toutes les obligations qui ont trait au salut, et qu’ils doivent encore, par toute sorte de soins et d’efforts les amener à conformer leur vie tout entière sua devoirs qui leur sont prescrits, ils feront une chose extrêmement utile, s’ils leur rappellent souvent la vertu et les effets de la Contrition. Les autres œuvras de piété, comme le soulagement des pauvres, les jeûnes, la prière et beaucoup d’autres choses semblables, d’ailleurs très bonnes et très saintes de leur nature, sont quelquefois rejetées de Dieu par la faute de ceux qui les font. Mais la Contrition ne saurait jamais cesser de Lui être chère et agréable. " Vous ne rejetterez point, ô mon Dieu, dit le Prophète, un cœur contrit et humilié. " Bien plus mous n’avons pas plus tôt conçu cette Contrition dans notre cœur, que Dieu sur le champ nous accorde la rémission de nos péchés. C’est ce que nous déclare le même Prophète dans un autre endroit: " J’ai dit, je confesserai cotre moi mon iniquité au Seigneur, et Vous, Vous m’avez remis aussitôt l’impiété de mon péché. " Et nous avons une figure sensible de cette vérité dans les dix lépreux que Notre-Seigneur envoya vers les Prêtres, et qui furent guéris avant d’arriver jusqu’à eus. Ce qui fait voir que la véritable Contrition dont nous venons de parler possède une vertu si grande qu’à cause d’elle le Seigneur nous accorde immédiatement la rémission de tous nos péchés.

Un autre puissant motif pour stimuler le zèle des Fidèles, sera de leur donner une méthode pour s’exciter à la Contrition. II faudra donc les avertir d’examiner souvent leur conscience et de voir s’ils ont gardé fidèlement les Commandements de Dieu et de l’Eglise. S’ils se reconnaissent coupables de quelque faute, qu’ils s’en accusent aussitôt devant Dieu, et qu’ils Lui demandent très humblement pardon. Qu’ils Le conjurent de leur accorder le temps de se confesser et de satisfaire. Et surtout qu’ils implorent le secours de sa Grâce pour ne plus retomber dans des péchés qu’ils ont un si grand regret d’avoir commis.

Enfin les Pasteurs tâcheront d’inspirer aux Fidèles une haine souveraine pour le péché, soit à cause de la honte et de l’infamie qu’il porte avec lui, soit à cause des inconvénients et des maux extrêmes qu’il attire sur noua. Car il éloigne de nous la bonté infinie de Dieu, de qui nous avons reçu les plus grands biens, et qui nous en promettait encore de plus précieux ; et il nous voue à la mort éternelle, à des tourments sans fin, à des supplices infinis.

Voilà ce que nous avions à dire sur la Contrition. Venons maintenant à la seconde partie du sacrement de Pénitence, qui a besoin d’être expliquée par les Pasteurs avec le plus grand soin et la plus grande exactitude, comme on le verra facilement par ce qui va suivre.

 

Chapitre 23 - Du sacrement de la Pénitence

Tous les Chrétiens croyants et pratiquants sont persuadés que tout ce qu’il a plu à la bonté de Dieu de conserver, en ce temps-ci, dans son Eglise, de sainteté, de piété et de religion, on le doit en grande partie à la Confession. Il ne faut donc pas s’étonner que l’ennemi du genre humain, qui voudrait par ses satellites et ses ministres détruire la Foi catholique jusque dans ses fondements, ait fait tous ses efforts pour renverser cette sorte de citadelle de la Vertu chrétienne.

II faudra enseigner tout d’abord que l’institution de la Confession ne nous était pas seulement avantageuse ; mais qu’elle nous était même nécessaire. Sans doute, — et nous le reconnaissons — la Contrition efface les péchés, mais ne voit-on pas qu’elle doit être dans ce cas, si forte, si vive, si ardente, que la violence de la douleur puisse égaler et atteindre l’énormité des fautes commises ? et comme il y en a peu qui soient capables de parvenir à un si haut degré de repentir, il y en a peu aussi qui doivent espérer par ce moyen le pardon de leurs péchés. II était donc nécessaire que Notre-Seigneur Jésus-Christ, dans son infinie clémence, pourvût au salut de tous par une voie plus facile. Et c’est ce qu’il a réalisé d’une manière admirable, en donnant à son Eglise les clefs du Royaume des cieux. En effet, l’enseignement de la Foi catholique est formel. nous devons tous croire et affirmer sans réserve, que si quelqu’un est sincèrement repentant de ses péchés, s’il est bien résolu à ne plus les commettre à l’avenir, — lors même qu’il ne ressentirait pas une Contrition suffisante pour obtenir son pardon — tous ses péchés lui sont remis et pardonnés par le pouvoir des clefs, s’il les confesse à un Prêtre approuvé. Aussi tous les saints Pères ont eu soin de proclamer, et avec raison, que le ciel nous est ouvert par les clefs de l’Eglise, et le Concile de Florence a mis cette vérité hors de doute en décrétant " que l’effet du sacrement de Pénitence est de purifier du péché. "

Voici encore une autre considération qui nous montre les avantages et l’utilité de la Confession. L’expérience prouve que rien n’est plus propre à réformer les mœurs des personnes corrompues, que la confidence réitérée de leurs pensées, de leurs paroles et de leurs actions à un ami sage et fidèle qui peut les aider de ses services et de ses conseils. De même, et pour la même raison, nous devons regarder comme très salutaire à ceux qui sont troublés des remords de leurs fautes, de découvrir les maladies et les plaies de leur âme au Prêtre qui tient la place de Notre-Seigneur Jésus-Christ, et qui est soumis par les lois les plus sacrées au plus inviolable silence. Ils trouveront aussitôt par ce moyen des remèdes tout prêts, et qui possèdent une vertu céleste, non seulement pour guérir les maladies dont ils souffrent, mais encore pour les fortifier en vue de l’avenir, et rendre leurs rechutes très difficiles.

Il ne faut pas oublier non plus un autre avantage de la Confession, qui intéresse vivement la société tout entière. En effet, retranchez de la Religion chrétienne la Confession sacramentelle, et bientôt le monde sera inondé de crimes cachés et monstrueux. Puis, en peu de temps l’habitude du mal rendra les hommes si dépravés qu’ils ne rougiront plus de commettre publiquement ces iniquités, et d’autres beaucoup plus graves encore. Au contraire, la honte salutaire attachée à la Confession est un frein à la licence et à l’audace du vice, et elle retient les plus pervertis.

Ces avantages une fois exposés, les Pasteurs auront à faire connaître la nature et la vertu de la Confession. Voici comment on la définit: une accusation de ses péchés faite pour en recevoir la rémission par la vertu des clefs, dans le sacrement de Pénitence.

Et d’abord, c’est avec raison qu’on l’appelle une accusation, parce que nous ne devons point confesser nos péchés, comme pour en faire parade, à l’exemple de ceux " qui se réjouissent quand ils ont fait le mal " ; ni pour faire un récit, comme s’il s’agissait d’amuser des auditeurs oisifs ; mais il faut les énumérer avec l’intention de nous avouer coupables, et le désir de les venger sur nous-mêmes par la Pénitence.

Mais si nous confessons nos péchés, c’est pour en obtenir le pardon. Car le tribunal de la Pénitence est bien différent des tribunaux humains. Là, en effet, la peine et la confusion des aveux sont loin de compter pour l’acquittement de la faute, et pour le pardon des égarements.

Les Saints Pères semblent avoir donné de la Confession une définition semblable à la nôtre, quoique en termes différents, quand ils disent comme Saint Augustin: " La Confession, c’est la révélation d’une maladie cachée, avec l’espoir d’en obtenir la guérison. " ; ou bien, comme Saint Grégoire: " C’est la détestation des péchés, " Ces deux définitions peuvent facilement se rapporter à la nôtre, puisque la nôtre les contient.

Mais ici, — et c’est une de leurs obligations les plus importantes, — les Pasteurs auront soin d’enseigner aux Fidèles, et sans la moindre hésitation, que la Confession a été instituée par Notre-Seigneur Jésus-Christ (qui a bien fait toutes choses, et uniquement pour notre salut), et qu’elle est un effet de sa bonté et de sa miséricorde infinies envers nous. En effet, un jour que ses Apôtres, après sa Résurrection, étaient réunis dans le même lieu, Il souffla sur eux, en disant: " Recevez le Saint-Esprit, les péchés seront remis à ceux à qui vous les remettrez, et ils seront retenus à ceux à qui vous les retiendrez. "

Mais si Notre-Seigneur a donné aux Prêtres le pouvoir de retenir et de remettre les péchés, évidemment Il les a aussi établis juges en cette matière. C’est ce qu’Il semble avoir voulu exprimer, lorsque, au moment de la résurrection de Lazare, II chargea les Apôtres de le dégager des liens qui le tenaient enseveli, Voici en effet comment Saint Augustin explique ce passage: " Maintenant, dit-il, les Prêtres peuvent eux-mêmes être encore plus utiles et remettre beaucoup plus aux pénitents dont ils pardonnent les péchés dans la Confession ; car en donnant à délier à ses Apôtres Lazare qu’Il venait de ressusciter, Jésus-Christ montrait par là que les Prêtres ont reçu le pouvoir de délier. " C’est encore pour nous apprendre la même vérité que le Sauveur ayant guéri les dix lépreux, sur le chemin, leur ordonna " d’aller se faire voir aux Prêtres " et de se soumettre à leur décision. Et comme, selon la sage remarque du Concile de Trente, il est impossible de porter un jugement équitable, et de garder les véritables règles de la justice en punissant le crime dans une cause qui n’est point suffisamment instruite, et que l’on ne connaît point à fond, il s’ensuit que les pénitents sont obligés de révéler aux Prêtres, par la Confession, tous leurs péchés les uns après les autres.

Voilà donc ce que les Pasteurs enseigneront, conformément aux décisions du Concile de Trente. Et à la doctrine constante de l’Eglise catholique. Partout en effet nous trouvons, en lisant les Saints Pères avec attention, les témoignages les plus clairs pour établir que le sacrement de Pénitence a été institué par Notre-Seigneur Jésus-Christ, et qu’il faut regarder comme vraiment évangélique la loi de la Confession sacramentelle, appelée par les Grecs exomologèse et exagoreuse (c’est-à-dire, confession et manifestation d’une chose secrète.) et même, si nous consultons les figures de l’Ancien testament, nous n’aurons pas de peine à reconnaître que c’est encore à la Confession qu’il faut rapporter ces sacrifices si variés qui étaient offerts par les Prêtres, pour expier les différentes sortes de péchés.

Mais s’il faut apprendre aux Fidèles que Notre-Seigneur Jésus-Christ Lui-même a institué la Confession, il faut aussi les avertir que l’Eglise y a ajouté de son autorité certains rites, certaines cérémonies consacrées, qui, sans tenir à l’essence même du Sacrement, ne servent pas moins à en faire ressortir davantage la dignité et l’excellence ; toutes choses qui excitent la piété des pénitents, et qui disposent mieux leur cœur à recevoir la grâce de Dieu. En effet, lorsque nous confessons nos péchés, prosternés aux pieds du Prêtre, la tête découverte, les yeux baissés vers la terre, élevant des mains suppliantes, et donnant d’autres marques semblables d’humilité chrétienne qui ne sont pas essentielles, tout cela nous fait entendre clairement que nous devons reconnaître dans ce Sacrement une vertu vraiment céleste, et solliciter, en l’implorant avec la plus vive ardeur, la miséricorde divine.

Et qu’on se garde bien de penser que la Confession a été instituée par Notre-Seigneur Jésus-Christ dans des conditions telles que nous ne serions pas obligés d’en faire usage. Au contraire il faut que les Fidèles soient bien persuadés que tout homme coupable d’un péché mortel ne peut revenir à la vie de la Grâce que par la Confession sacramentelle. Et nous en avons une preuve sensible dans la figure employée par Notre-Seigneur pour exprimer le pouvoir d’administrer ce Sacrement ; il l’appelle " la clef du Royaume des cieux. " De même en effet qu’il n’est pas possible de pénétrer dans un endroit fermé sans le secours de celui qui en a la clef, de même aussi personne ne peut entrer au ciel, si les portes n’en sont ouvertes par les Prêtres à qui Jésus-Christ en a confié les clefs. Autrement l’usage des clefs semblerait nul dans l’Église, et ce serait en vain que celui qui aurait reçu le pouvoir de ces clefs voudrait interdire à quelqu’un l’accès du ciel, s’il y avait un autre moyen de s’en faire ouvrir l’entrée. Saint Augustin comprenait admirablement cette vérité, lorsqu’il s’écriait: " non, que personne ne se dise: Je fais en secret pénitence devant le Seigneur, et Dieu de qui vient le pardon connaît bien ce que j’éprouve au fond du cœur. Car alors on aurait dit sans raison: ce que vous délierez sur la terre sera délié dans le ciel ; sans raison aussi les clefs auraient été confiées à l’Église de Dieu ". Tel est également le sentiment exprimé par Saint Ambroise, dans son livre de la Pénitence, livre qu’il écrivit pour détruire l’erreur des Novatiens qui prétendaient que Dieu seul a le pouvoir de remettre les péchés. " Lequel des deux, dit-il, honore Dieu davantage, de celui qui obéit à ses Commandements, ou de celui qui y résiste ? Dieu nous a ordonné d’obéir à ses Ministres, et lorsque nous leur obéissons, c’est Dieu seul que nous honorons. "

Puisqu’il est impossible de douter que la loi de la Confession a été portée et établie par Notre-Seigneur Jésus-Christ Lui-même, il reste à examiner qui sont ceux que cette loi oblige, à quel âge, et en quel temps de l’année on doit la remplir.

Et d’abord, d’après le Canon du Concile de Latran, qui commence par ces mots: " Tout Fidèle de l’un et de l’autre sexe, " il est sûr et certain que personne n’est tenu à la loi de la Confession avant l’âge de raison. Mais cet âge ne peut être fixé d’une manière générale et positive. La règle en cette matière est de faire confesser les enfants, dès le moment où ils distinguent le bien du mal, et commencent à être capables de quelque ruse. Lorsqu’un homme est parvenu à cette époque de la vie où il peut et doit penser à son salut éternel, dès lors il est obligé de confesser ses péchés à un Prêtre, puisqu’il n’y a pas d’autre moyen de salut pour lui s’il est coupable de quelque péché mortel.

Quant au temps où il est particulièrement nécessaire de se confesser, l’Église l’a décidé et décrété dans le Canon dont nous avons déjà parlé. Elle ordonne à tous les Fidèles de confesser leurs péchés au moins une fois chaque année. Mais si nous faisons attention à ce que réclament les intérêts de notre salut, sans aucun doute, toutes les fois que nous sommes en danger de mort, ou bien que nous sommes obligés de faire une chose qu’un homme souillé de péchés n’est pas digne d’accomplir, comme par exemple d’administrer et de recevoir les Sacrements, toujours alors nous devons recourir à la Confession. Mais surtout nous devons user de ce moyen lorsque nous craignons d’oublier quelque faute. Car nous ne pouvons confesser que les péchés dont nous nous souvenons ; et nous n’obtenons point du Seigneur le pardon de nos fautes, si le sacrement de Pénitence ne les efface par la Confession.

Il y a encore plusieurs choses à observer dans la Confession. De ces choses, les unes sont nécessaires pour la validité du Sacrement, et les autres ne le sont pas absolument. toutes néanmoins doivent être expliquées avec exactitude. Il ne manque ni de traités, ni de commentaires où l’on peut puiser facilement, sur ces différents points, les explications désirables. Les Pasteurs enseigneront avant tout que nous devons nous efforcer de rendre nos confessions entières et complètes. nous sommes obligés de découvrir au Prêtre tous nos péchés mortels. Pour les fautes vénielles, qui ne nous font pas perdre la grâce de Dieu, et dans lesquelles nous tombons plus souvent, s’il est bon et utile de les confesser, comme le prouve la pratique des personnes pieuses, cependant on peut les omettre sans péché, et les expier par beaucoup d’autres moyens. Mais pour les péchés mortels, il faut, comme nous venons de le dire, les énumérer tous, les uns après les autres, quand même ils seraient extrêmement secrets, et du genre de ceux qui sont défendus par les deux derniers Commandements du Décalogue. Car il arrive assez souvent que ces sortes de péchés blessent plus dangereusement l’âme que ceux que l’on commet ouvertement et en public. Et c’est ce que le Saint Concile de Trente a défini, et que l’Église catholique a toujours enseigné, comme on peut le voir par le témoignage des saints Pères. Saint Ambroise dit: " Nul ne peut être justifié de son péché, s’il ne le confesse. " Saint Jérôme, commentant l’Ecclésiaste, confirme pleinement la même vérité. " Quand le serpent infernal, dit-il, a mordu quelqu’un secrètement et sans témoin et qu’il l’a infecté du venin du péché, si celui-ci se tait, qu’il ne fasse point pénitence et qu’il ne veuille point découvrir sa blessure à son frère ou à son supérieur, le supérieur qui avait les paroles pour le guérir, ne pourra lui être utile en rien. " Saint Cyprien enseigne clairement la même chose dans le traité " de Lapsis ", (c’est-à-dire de ceux qui sont tombés, dans la persécution.) " Quoique ces personnes, dit-il, n’aient point commis en effet le crime de sacrifier ou de recevoir un certificat, néanmoins, parce qu’elles en ont eu la pensée, elles doivent s’en confesser avec douleur au Prêtre de Dieu. " Enfin tel est le sentiment et la voix unanime de tous les Docteurs de l’Église. D’où il suit qu’il faut apporter dans la Confession la même application et le même soin que l’on a coutume de donner aux affaires les plus importantes, et de concentrer si bien ses efforts sur ce point que l’on puisse guérir les plaies de son âme, et arracher de son cœur les racines du péché.

Mais ce n’est pas assez de confesser et d’expliquer les fautes graves ; nous devons également faire connaître les circonstances qui les ont accompagnées, et qui en augmentent ou en diminuent notablement la malice. Car il y a des circonstances si considérables qu’elles suffisent seules pour imprimer à une faute le caractère du péché mortel. C’est pourquoi on est toujours obligé de les confesser. Si par exemple quelqu’un a tué un homme, il doit dire si cet homme était laïque ou ecclésiastique. De même, si le péché a entraîné un complice, il est nécessaire de faire connaître si cette personne était libre, mariée, parente, ou consacrée à Dieu par un vœu. Car toutes ces circonstances sont autant de péchés d’espèce différente. C’est pourquoi les Docteurs dans la science sacrée distinguent toujours les fautes en les désignant suivant les circonstances qui les accompagnent et qui peuvent augmenter ou diminuer le degré de culpabilité. Le vol aussi est un péché, mais celui qui vole un écu fait un péché moins grave que celui qui en prend cent, deux cents, ou davantage, ou qui s’empare des biens d’Église. Il faut dire la même chose des circonstances de temps et de lieu ; mais on trouve là -dessus dans un grand nombre de livres des exemples trop connus pour que nous les citions ici. On est donc obligé, avons-nous dit, de déclarer toutes ces circonstances. Quant à celles qui n’augmentent pas beaucoup la malice du péché, on peut les omettre sans crime. Mais c’est une chose tellement nécessaire que la Confession soit entière et parfaite, comme nous le disions plus haut, que si quelqu’un omettait exprès et de propos délibéré, quelqu’une de ces circonstances, en confessant les autres d’ailleurs, non seulement il ne tirerait aucun fruit de cette Confession, mais encore il commettrait un nouveau péché. Une semblable déclaration ne saurait être regardée comme une véritable Confession sacramentelle. Bien plus le pénitent est obligé de recommencer cette Confession, et de s’accuser spécialement d’avoir profané la sainteté du sacrement de Pénitence par une Confession simulée. Mais s’il arrive pour quelque autre motif que la Confession ne soit pas entière, soit parce que le pénitent aura oublié quelque péché, soit parce qu’il aura mis quelque négligence à examiner sa conscience, lorsque cependant il avait l’intention positive de confesser entièrement tous ses péchés, il ne sera point nécessaire de la recommencer ; et si ces péchés oubliés lui reviennent à la mémoire, il suffira de les déclarer au Prêtre dans un autre moment. toutefois il faut bien voir ici si l’on n’a point examiné sa conscience avec trop de mollesse et de lâcheté, et si le peu de soin qu’on a mis à se rappeler ses péchés ne montre pas que précisément l’on n’avait point la volonté de s’en souvenir. S’il en était ainsi, il faudrait absolument recommencer la Confession.

Il est nécessaire en second lieu que l’accusation soit claire, simple et sincère. Elle ne doit point être faite avec art, comme il arrive à quelques-uns qui semblent plutôt exposer la justification de leur conduite que confesser leurs péchés. non, la Confession doit être telle qu’elle nous fasse connaître au Prêtre, comme nous nous connaissons nous-mêmes, et qu’elle donne le certain pour certain, et pour douteux ce qui n’est pas sûr. Qualité qui manque évidemment à la Confession, quand on ne passe pas en revue chacun de ses péchés, ou que l’on dit des choses étrangères à ce que l’on doit dire.

D’autre part, on ne saurait trop louer ceux qui mettent de la discrétion et de la modestie dans l’accusation et l’explication de leurs fautes. trop de paroles ne valent rien. Il faut dire brièvement et avec retenue ce qui est nécessaire pour faire connaître la nature et la qualité de chaque faute.

En quatrième lieu, un des principaux soins, aussi bien du pénitent que du Confesseur, c’est de faire en sorte que tout ce qui se dit en Confession reste enseveli dans le secret. C’est pourquoi il n’est pas permis de se confesser par procureur ou par lettre, parce que le secret ne peut être assez exactement gardé par ces deux moyens.

Mais ce que les Fidèles doivent avoir le plus à cœur, c’est de purifier souvent leur conscience par la confession de leurs fautes. Dès qu’on a eu le malheur de tomber en quelque péché mortel, rien ne peut être plus salutaire, à cause des dangers nombreux qui nous menacent sans cesse, que de s’en confesser sans retard. Et d’ailleurs, quand même nous pourrions tous nous promettre une longue carrière ici-bas, ne serait-ce pas une chose vraiment honteuse que, nous qui sommes si empressés à enlever les taches de nos corps et de nos vêtements, nous fussions moins zélés pour purifier notre âme des hideuses souillures du péché ?

Parlons maintenant du Ministre du sacrement de Pénitence.

Ce Ministre, c’est le Prêtre qui a le pouvoir ordinaire ou délégué d’absoudre. Sur ce point les Lois ecclésiastiques sont très claires. toutefois, pour remplir la fonction dont il s’agit, le pouvoir d’Ordre ne suffit pas, il faut de plus le pouvoir de juridiction. nous avons une preuve très frappante de cette vérité dans les paroles que Saint Jean met dans la bouche de Notre-Seigneur " Les péchés seront remis à ceux à qui vous les remettrez, et ils seront retenus à ceux à qui vous les retiendrez. " Or, ce pouvoir n’a pas été donné à tous les hommes, mais seulement aux Apôtres. Et les Apôtres ont eu les Prêtres pour successeurs dans ce ministère. C’est d’ailleurs une chose très naturelle et entièrement conforme à la raison. Car les grâces que nous recevons dans ce Sacrement nous viennent toutes de Jésus-Christ, comme d’un Chef dont nous sommes les membres ; et par conséquent ceux-là seuls doivent administrer la Pénitence au corps mystique de Jésus-Christ, c’est-à-dire aux Fidèles, qui possèdent le pouvoir de consacrer son véritable Corps ; d’autant plus que c’est par ce même Sacrement que les Chrétiens se rendent capables et dignes de recevoir la sainte eucharistie.

Pour comprendre combien en cette matière le droit du Prêtre ordinaire était réservé et sacré dans la primitive Église, il suffit de connaître les anciens Décrets des Pères, qui défendaient à tout évêque et à tout Prêtre d’exercer le moindre ministère dans la Paroisse d’un autre, sans l’autorisation de celui qui la gouvernait, ou bien sans une pressante nécessité. Ainsi l’avait réglé l’Apôtre Saint Paul lui-même, lorsqu’il ordonnait à Tite " d’établir des Prêtres dans toutes les villes  ", pour nourrir et fortifier les Fidèles par le céleste Aliment de la Doctrine et des Sacrements.

Cependant quand il y a danger de mort et que l’on ne peut se confesser à son propre Pasteur, le Concile de Trente nous enseigne que l’Église, pour ne laisser perdre aucune âme dans ces circonstances, a toujours été dans l’usage de permettre à tous les Prêtres d’absoudre de toutes sortes de péchés, quel que fût le pouvoir nécessaire à cet effet, et même de l’excommunication.

Ce n’est pas assez que le Prêtre soit revêtu des pouvoirs d’Ordre et de juridiction, qui d’ailleurs lui sont absolument nécessaires ; il est indispensable qu’il possède les lumières, la science et la prudence de son état, puisqu’il remplit en même temps les fonctions de juge et de médecin. Comme juge, il est évident qu’il lui faut une science plus qu’ordinaire, soit pour découvrir les péchés, soit pour distinguer, au milieu de leurs nombreuses espèces, ceux qui sont graves de ceux qui sont légers, selon la condition, le rang et la classe de chacun. Comme médecin, il a besoin aussi de la plus grande prudence, puisqu’il doit mettre tous ses soins à donner au malade les remèdes les plus propres à guérir son âme, et à le prémunir contre les rechutes dans le mal. Et c’est ce qui doit faire comprendre aux Fidèles avec quelle attention chacun d’eux doit se choisir un Prêtre recommandable par l’intégrité de sa vie, par sa science, sa sagesse, son jugement sûr, un Prêtre enfin qui se rende compte de l’importance et de la gravité du ministère qui lui est confié, qui sache appliquer dans les divers cas les pénitences convenables, et reconnaître qui sont ceux qu’il faut lier, ou délier.

Mais comme il n’y a personne qui ne désire très vivement cacher ses crimes et la honte de ses fautes il faut avertir les Fidèles qu’ils ne doivent craindre en aucune façon que le Prêtre à qui ils se seront confessés révèle jamais à personne les péchés qu’ils lui auront fait connaître, ni qu’il puisse jamais leur arriver aucun mal par suite de la Confession. Les lois et décrets de l’Eglise veulent que l’on sévisse de la manière la plus rigoureuse contre les Prêtres qui ne tiendraient pas ensevelis dans un silence éternel et sacré tous les péchés qu’ils auraient connus par la Confession. Aussi lisons-nous dans les actes du Concile général de Latran: " Que le Prêtre tremble de jamais trahir le pécheur par un mot, -par un signe, ou de toute autre manière. "

Après avoir parlé du ministre du sacrement de Pénitence, l’ordre des choses demande que nous expliquions certains points principaux, qui ont rapport à l’usage de la Confession et à la manière dont le Prêtre doit agir dans l’administration de ce Sacrement. Un grand nombre de Fidèles, hélas ! ne désirent rien tant que de voir s’écouler les jours fixés par l’Eglise pour la Confession. Ils sont si éloignés de la perfection chrétienne qu’ils cherchent à peine à se rappeler leurs péchés pour les accuser au Prêtre, bien loin d’apporter la diligence et le soin qui seraient nécessaires pour attirer sur eux la grâce de Dieu.. néanmoins, comme les Prêtres ne doivent rien négliger pour le salut de leurs pénitents, leur premier soin sera d’examiner attentivement s’ils ont une véritable Contrition de leurs péchés, et s’ils sont sincèrement et fermement résolus à ne plus pécher dans la suite. S’ils les trouvent réellement dans ces dispositions, ils s’appliqueront de toutes leurs forces à les exhorter vivement à rendre grâces à Dieu de tout leur cœur, pour un bienfait si grand et si précieux, et à implorer sans cesse le secours de la grâce céleste, afin que protégés et couvert par elle, ils puissent résister et tenir tête à leurs mauvaises passions.

Une autre pratique qu’il faut également recommander aux pénitents, c’est de ne passer aucun jour sans méditer quelqu’un des Mystères de la Passion de Notre-Seigneur Jésus-Christ, et sans s’exciter, avec toute l’ardeur possible, à L’imiter et à L’aimer d’un amour souverain. Cette méditation les rendra de jour en jour plus forts contre les tentations du démon. En effet si nous succombons si promptement et si facilement à la moindre attaque de l’ennemi, c’est que nous négligeons d’entretenir et d’exciter dans nos cœur s par la contemplation des choses du ciel le feu de cet amour divin qui seul peut raffermir et relever notre courage. Mais si le Confesseur s’aperçoit que celui qui lui accuse ses péchés n’est pas véritablement contrit et repentant, il doit s’efforcer de lui inspirer un amour très vif de la Contrition, afin qu’enflammé par le désir d’obtenir un don si excellent, il se mette aussitôt à l’implorer et à le solliciter humblement de la miséricorde de Dieu.

Mais il faut particulièrement s’attacher à réprimer l’orgueil de ceux qui cherchent par des excuses, soit à justifier, soit à diminuer leurs péchés. Il en est, par exemple, qui, en s’accusant de s’être mis dans une violente colère, en rejettent aussitôt la cause sur un autre dont ils se plaignent d’avoir reçu les premiers une injure. Il faut les avertir que ces sortes d’excuses sont la marque d’un esprit orgueilleux, et d’un homme qui ne réfléchit pas à la grandeur de son péché, ou qui ne la comprend nullement ; et qu’elles sont bien plus propres à augmenter leurs fautes qu"à les diminuer. Car prétendre justifier ainsi sa conduite, c’est sembler dire ouvertement que l’on aura de la patience quand on ne sera injurié par personne. Y a-t-il rien qui soit plus indique d’un Chrétien ? Au lieu de déplorer le sort de celui qui a fait l’injure, et d’être affligé de la perversité de son action, on s’irrite contre lui, contre son frère ; est bien loin de profiter d’une si belle occasion d’honorer Dieu par la patience, et de corriger son frère par mansuétude, on fait tourner à sa perte un sujet de mérites.

Cependant, c’est une faute bien plus funeste encore de ne pas oser confesser ses péchés, parce qu’on est retenu par une mauvaise honte. Il faut encourager ceux qui ont ce malheur, et leur représenter qu’ils n’ont rien à craindre en découvrant leurs fautes, puisque leur Confesseur ne s’étonnera jamais de trouver les hommes pécheurs: c’est là en effet un mal qui est commun à tous, et qui est une suite naturelle de la faiblesse et de la fragilité humaine.

Il en est d’autres qui, parce qu’ils se confessent trop rarement, ou parce qu’ils n’ont pris aucune peine, pour examiner leur conscience et reconnaître leurs péchés, ne savent ni expliquer leurs fautes, ni par où commencer l’accomplissement de ce devoir. Ceux-là doivent être repris plus vivement, et surtout il faut bien leur montrer qu’avant de se présenter au Prêtre, chacun de nous doit faire tous ses efforts pour avoir la Contrition de ses péchés et que l’on ne peut jamais atteindre ce but, si l’on ne s’applique à les reconnaître en les repassant dans sa mémoire les uns après les autres. C’est pourquoi, lorsque le Confesseur rencontrera des pénitents aussi peu préparés, ils les renverra dans les termes les plus bienveillants, et il les exhortera à prendre quelque temps pour penser à leurs fautes, et à revenir ensuite. Mais si ces pénitents affirment qu’ils ont apporté à cette affaire tous leurs soins et toute leur diligence, le Prêtre — dans la crainte trop fondée qu’une fois renvoyés, ils ne reviennent plus — se fera un devoir de les entendre, surtout s’ils montrent quelque désir de s’amender, et si lui-même peut les amener à reconnaître leur négligence, et à promettre qu’une autre fois ils feront un examen plus soigné et plus exact. Cependant ceci demande beaucoup de précautions: car si après avoir entendu la Confession de ces pénitents, le Prêtre juge qu’ils n’ont manqué ni d’exactitude en accusant leurs péchés, ni de douleur et de Contrition en les regrettant, il pourra les absoudre. Mais s’il s’aperçoit que l’une et l’autre de ces deux choses ont fait défaut, il leur conseillera et tâchera de les persuader d’examiner leur conscience avec plus d’attention, ainsi que nous venons de le dire, et il les renverra, après leur avoir parlé avec toute la douceur possible.

Et comme il arrive quelquefois aux femmes, lorsqu’elles ont oublié quelque péché en Confession, de n’oser pas retourner au Confesseur dans la crainte d’être soupçonnées de quelque grand désordre, ou de chercher à se donner la réputation d’une piété extraordinaire, il faudra enseigner souvent, et en public et en particulier, que personne ne peut avoir assez de mémoire pour se rappeler toutes ses actions, toutes ses paroles, et toutes ses pensées ; que par conséquent rien ne doit empêcher les Fidèles d’aller de nouveau trouver le Prêtre, lorsqu’ils se souviennent de quelque péché oublié auparavant.

Telles sont en général les règles que les Prêtres ont à observer dans la Confession. Venons maintenant à la troisième partie du sacrement de Pénitence, qui s’appelle la Satisfaction.

 

    Retour à la page "Temps liturgique"

Retour à la page d'accueil


Cette page a été modifiée par l'A.M.D.G le mercredi 12 mars 2003+
© Coordination "Ad Majorem Dei Gloriam" - 2001-2003